Covid-19 : De la continuité d’activité à la préparation d’un nouveau modèle
Tribunes

Covid-19 : De la continuité d’activité à la préparation d’un nouveau modèle

14/04/2020 Anne Tessier-Chênebeau, Directrice Générale Adjointe de Synertrade France

Inédite, la propagation fulgurante du Covid-19 à travers le monde impacte fortement les chaines logistiques. Usine du monde, la Chine occupe un rôle majeur. La fermeture ou ralentissement brutal d’un grand nombre de ses usines à mis en lumière l’extrême vulnérabilité de cette chaîne logistique mondialisée, obligeant les Etats à envisager de relocaliser certaines productions.

Les grands groupes français font déjà état d'au moins un milliard d'euros de pertes à cause du coronavirus et la plupart ont suspendu leurs objectifs 2020.

Sans succomber à la tentation d’élaborer un scénario catastrophe digne d’Hollywood avec, dans un avenir très proche, un krach boursier mondial et des pénuries de médicaments pour soigner les pathologies graves, la propagation impressionnante de ce virus venu de Chine, le Covid-19, place sous le feu des projecteurs mondiaux la très forte dépendance économique de du Vieux et du Nouveau Continent à la Chine.

Tous les secteurs sont exposés, de l’automobile à l’habillement, en passant par l’aéronautique, le BTP ou encore l’électronique. Dans ce dernier secteur, la Chine produit en effet 80% des circuits imprimés, 90% des terres rares et 50% de l’acier inoxydable consommés dans le monde. Si les industriels et distributeurs assurent qu’il n’y a, pour l’heure, pas de risque à court terme grâce à l’existence de stocks de sécurité, que se passera-t-il si cette crise sanitaire se prolonge ? Le principal risque aujourd’hui demeure l’incertitude quant au respect des engagements de livraison des fournisseurs chinois, dont les produits sont indispensables aux chaînes de production de nos grands industriels nationaux.

Dans un tel contexte, les directions Achats naviguent souvent à vue et jonglent avec des informations parcellaires et incertaines. L’activité reprend doucement son court en Chine, mais ce n’est pas non plus un retour à la normale, le pays n’a pas encore retrouvé son rythme d'avant crise et il faudra encore plusieurs mois pour ce faire.

 

Industrie, services, commerce et tourisme fortement impactés

Industrie, restauration, commerce, agro-alimentaire, tourisme, services, retail, automobile…. Pour résister et limiter les dégâts sur leur trésorerie, les grands groupes français doivent revoir leurs objectifs financiers à la baisse, anticiper les scénarii de sortie de crise en adaptant leurs organisations, et  revoir leurs politiques de dividendes.

Déjà très touchée on s’en souvient par l’impact du tsunami japonais en 2011 avec d’importantes ruptures de supply chain, l'industrie automobile mondiale affronte une crise sans précédent. L'arrêt des chaînes de production de voitures pourrait entraîner une chute des ventes comprise entre 10 % et 25 %. Et la situation devrait également avoir un impact sur les ventes en Chine, premier marché mondial, ainsi que des conséquences sur la chaîne d’approvisionnement, avec une pénurie de pièces fabriquées sur place.

Le secteur de la restauration, du tourisme et du transport aérien sont les plus touchés. Le groupe Air France-KLM avait fait une première estimation entre 150 et 200 millions d’euros pour l’impact du virus sur son résultat d’exploitation, cette estimation se faisant en plus dans le cas d’une reprise à partir d'avril, ce qui n’est malheureusement toujours pas le cas. Enfin, pour avril et mai 2020, le groupe prévoit que plus de 90% de la capacité prévue sera suspendue.

 

Les organisations Achats acteurs clé de la continuité d’activité et agents adaptogènes de l’ecosystème

Pour autant, chaque industrie, chaque groupe et organisation s’organise pour maintenir un plan de continuité d’activité et ainsi minimiser l’impact économique du Covid-19 sur ses activités.

A ce titre, les organisations achats jouent un rôle essentiel pour assurer la poursuite de l’approvisionnement, l’adaptation de la supply chain, l’évaluation de leurs fournisseurs sur leur capacité à assurer tout ou partie de la production attendue, gérer le risque associé et enfin garantir leurs paiements effectifs. Ce dernier point est structurant pour permettre aux entreprises de taille intermédiaire (start up, TPE, PME, ETI) de pouvoir préserver leur trésorerie face à la tempête économique.

La stratégie achats et de sourcing est clé pour faire face à une situation comme celle que nous vivons avec cette pandémie mondiale. Le sourcing fournisseur équilibré, juste, réparti sur chaque continent en commençant par le territoire national permet en effet de limiter l’impact d’une crise impactant l’ensemble des chaines logistiques mondiales. Il s’agit là de maturité achats.

Par ailleurs, il est certain que les organisations achats ayant la maturité d’avoir déjà digitalisé leurs processus ont à ce jour une longueur d’avance pour assurer leurs missions au mieux.
Certaines industries par exemple ayant lancé il y a quelques mois un programme de digitalisation de leur relation fournisseurs sont aujourd’hui à nos côtés, en train d’accélérer massivement cette démarche étant donné que les relations physiques et évaluations sur site ont disparu.

Ainsi nous assistons également à l’émergence de nouveaux uses cases d’e-procurement en cette période de travail à distance pour faire face à de nouvelles demandes utilisateurs. C’est le cas de grandes sociétés de services qui dans le cadre de leur projet P2P, ayant déployé des catalogues punch-out via Amazon nous demandent d’ores et déjà de pouvoir changer les sites de livraison pour honorer les commandes de leurs collaborateurs directement chez eux afin de leur donner les moyens nécessaires à la poursuite de leurs missions avec le matériel nécessaire (imprimantes, PC, câbles d’alimentation…).

Il est certain que cette période de crise nous demande à tous et chacun de nous adapter, nous réinventer et va continuer de nous confronter ensemble a de nouveaux uses case, de revoir notre manière de travailler en interne comme en externe avec l’ensemble de notre écosystème.

 

Le « made in France » reprend des couleurs

Avec une Chine qui produit moins et une sortie de crise à l’échéance incertaine, le « made in France » reprend des couleurs. Le 9 mars, le ministre de l’économie et des finances, Bruno le Maire, a lancé au micro de France Inter, « nos peuples demandent que nous soyons plus indépendants », ajoutant, « il faut que nous tirions (…) toutes les conséquences de cette épidémie sur l'organisation de la mondialisation et notamment sur les chaînes de valeur ». Autrement dit que les supply chains des secteurs stratégiques soient mieux protégés et moins dépendantes, à commencer par le secteur de la santé et de la pharmacie.

Selon l'Académie française de pharmacie, 80% des principes actifs consommés en Europe sont produits en Chine, en Inde et en Asie du Sud-Est. C’est notamment le cas du paracétamol, produit à 60% par la Chine. Face aux rumeurs et craintes d’une pénurie de Doliprane, l’anti-douleur star du groupe pharmaceutique Sanofi, son directeur industriel, Philippe Luscan, l’a affirmé : seuls 5% de leurs principes actifs viennent de Chine. L’entreprise française produit en effet 70% de ses besoins en interne grâce, notamment, à ses 40 usines en Europe.

Une stratégie aujourd’hui payante que d’autres commencent à adopter. Ainsi, en Seine-et-Marne, la société Still, qui produit des thermomètres, a relancé sa production en France, en augmentant ses cadences. Délocalisée à 80% en Chine, la production pourrait être relocalisée dans l’hexagone car, comme l’a expliqué son chef d’entreprise, Gérard Lux, à Europe 1, « nous avons toutes les matières premières pour produire tout ce qui est en verre. Et j’ai identifié 15 références que nous pouvons produire immédiatement ».

Crise sanitaire mondiale, le coronavirus se présente aujourd’hui comme une opportunité de garder le savoir-faire en France et repenser notre modèle économique. Il s’agit alors de booster nos capacités de production pour renforcer notre mission économique locale et ainsi garantir les emplois, la préservation des talents et l’attractivité du territoire pour les investissements étrangers. Il ne tient qu’à nous de dessiner ensemble le nouveau visage d’une France qui ose, une France fière, qui sans céder à la peur du repli, assume d’unir ses forces industrielles, politiques, intellectuelles et de recherche et développement pour rebondir et sortir de cette crise sans précédent plus forts qu’hier.

 

Plus que jamais le Made In France a toute sa place dans le monde du jour d’après.

 

Afin de mettre en lumière la manière dont la communauté Achat s’adapte à ce contexte challenging à tous égards, venez nous partager votre expérience ! Racontez-nous, présentez-nous spontanément la manière dont VOUS vous adaptez au sein de vos organisations !
Nous organisons le Mardi 5 Mai 2020 un webinar interactif, participatif, dédié aux nouveaux Use Cases Achats que nous voyons émerger en cette période de crise et de travail a distance. Nous comptons sur vos témoignages pour partager entre pairs et apprendre, grandir ensemble.
Alors n’attendez plus écrivez-nous à contact@synertrade.com pour contribuer activement à cet évènement qui se veut aussi pragmatique qu’utile ! Car chez Synertrade nous somme convaincus que c’est ENSEMBLE que nous trouverons les clefs de nous réinventer et préparer le futur des Achats !

Anne Tessier-Chênebeau, Directrice Générale Adjointe de Synertrade France

Anne Tessier-Chênebeau, Directrice Générale Adjointe de Synertrade France

Diplômée en affaires internationales et sciences politiques, Anne Tessier-Chênebeau a débuté sa carrière dans des institutions gouvernementales et diplomatiques. En 2006, elle rejoint le groupe Bull où elle exerce différents postes opérationnels liés au conseil et développement commercial en France et à l'international. Puis elle rejoint ATOS en 2014 en tant que directrice de grands comptes internationaux. Elle est très vite nommée bras droit du Vice-Président Executif en charge du Secteur Défense et Aerospace pour le Groupe. En 2016, elle rejoint Linedata, éditeur international de logiciels financiers en tant que Directrice de Cabinet du Président fondateur. Anne Tessier-Chênebeau est alors en charge de la gestion du changement de la société et de la croissance organique.

En 2018, elle rejoint l’éditeur Synertrade en tant que Directrice commerciale avant d’en prendre la tête en janvier 2020 en étant nommé Directrice Générale Adjointe. Son engagement fort vis-à-vis des clients doublé d’un leadership affirmé ont créé sa marque de fabrique, pour soutenir l’excellence opérationnelle des équipes Synertrade France.

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